Guide avancé : partie 1
Les thrips représentent un groupe d’insectes remarquablement cryptiques et omniprésents. Ils appartiennent à l’ordre des thysanoptères, ou « ailes frangées », en raison de leurs ailes longues et étroites qui ressemblent à des plumes. Moins de 2,5 mm de long, ces petits insectes élancés sont des ravageurs très répandus dans les serres et les chambres de culture à travers le Canada. Il en existe plus de 7 000 espèces dans le monde, qui se présentent sous diverses couleurs allant du blanc au jaune et du noir au marron. Ces insectes remplissent également de nombreuses fonctions dans l’écosystème. Certains sont prédateurs ou se nourrissent inoffensivement de pollen et de champignons, mais les plus connus sont les thrips qui se nourrissent de plantes. Ces quelque 25 espèces comptent parmi les ravageurs les plus dévastateurs pour l’agriculture.
Les thrips les plus courants dans les serres et les installations de culture intérieure au Canada sont :
- le thrips des petits fruits (Frankliniella occidentalis)
- le thrips de l’oignon (Thrips tabaci)
- le thrips de l’impatiens (Echinothrips americanus)
Parmi les espèces moins courantes, on compte :
- le thrips des serres (Heliothrips haemorrhoidalis)
- le thrips du poivron (Thrips parvispinus)
- le thrips du rosier (Thrips fuscipennis)
- le thrips des fleurs (Frankliniella intonsa)
- le thrips du piment (Scirtothrips dorsalis)

Les thrips endommagent directement le feuillage, les fleurs et les fruits avec leurs pièces buccales perçantes et leur ovipositeur tranchant. Ils sont également des vecteurs de phytovirus et peuvent provoquer des dégâts indirects. Bien qu’il soit difficile d’estimer avec certitude le coût pour les agriculteurs canadiens, il est fort probable qu’il s’élève à plusieurs centaines de millions de dollars par an. Le potentiel dévastateur d’une infestation de thrips demande une grande vigilance de la part des producteurs. Les trois plus grands défis de la lutte contre les thrips sont :
(1) leur capacité de développer rapidement une résistance aux pesticides courants ;
(2) leur grande variété de plantes hôtes ;
(3) leurs stades de vie séparés et de taille minuscule.
Le présent guide décrit le cycle biologique du thrips, son écologie, ainsi que quelques informations sur chacune des espèces susmentionnées. Comme pour tout ravageur ou pathogène, il est essentiel de comprendre la biologie et le comportement du thrips pour mener une lutte antiparasitaire efficace et rigoureuse.
Comment ces espèces de thrips se sont-elles répandues dans le monde entier?
Plusieurs des espèces de thrips les plus nuisibles pour les cultures au Canada proviennent de régions très éloignées. Certains sont originaires de la Méditerranée et de l’Asie.
Ces insectes s’avèrent très envahissants en raison de :
- la commerce et le transport de matériel végétal à l’échelle mondiale ;
- la nature cryptique des thrips ;
- leur capacité à s’adapter facilement à de nouveaux environnements.
Au cours du dernier siècle, le commerce mondial a connu une croissance sans précédent. Les économies et les industries bénéficient d’un accès accru aux ressources, aux matériaux et aux produits ; toutefois, ces marchandises peuvent véhiculer certains passagers clandestins. Un grand nombre de ces espèces envahissantes ont une incidence considérable sur l’économie et l’environnement — c’est le cas notamment des thrips.
Les thrips, étant très petits, peuvent facilement se dissimuler dans les couverts végétaux et les résidus de terre, si bien que l’on ne parvient pas à les détecter dans les matériaux transportés. Leur courte durée de vie, grande capacité de reproduction et alimentation généraliste leur permettent une implantation rapide dès leur arrivée dans les nouvelles cultures, serres et régions. De nouvelles populations et de nouvelles sources d’infestation et de perte de récoltes se sont ainsi multipliées dans le monde entier.
Comment les thrips pénètrent-ils généralement dans les serres et les espaces de culture en intérieur?
Les thrips s’introduisent dans une culture en nombre suffisant pour constituer un problème urgent par trois voies principales :
- les boutures importées ;
- les pupes en dormance dans les résidus des cultures antérieures laissées sur le sol ;
- le vent — introduction par les évents, depuis les habitats ou les cultures à proximité.
* Les thrips sont également introduits dans les installations sur les vêtements/cheveux du personnel et comme nymphes en dormance dans les milieux de culture (ces cas constituent plutôt des inoculations avec des nombres généralement insuffisants pour provoquer une infestation immédiate).
Boutures importées — L’importation des boutures et des jeunes plants risque d’introduire des espèces de thrips exotiques et invasives dans de nouveaux environnements. Même les propagateurs et les fournisseurs les plus assidus sont susceptibles de ne pas remarquer la présence de thrips et de les transmettre à leurs clients et d’autres producteurs, généralement de manière inaperçue dans les tissus des feuilles ou des fleurs où ils sont présents en tant qu’œufs. Ce problème touche particulièrement les plantes ornementales tropicales et exotiques, car le matériel végétal passe souvent d’un pays à l’autre et d’une région à l’autre et répand rapidement à travers le monde entier des espèces de thrips inconnues ou exotiques. Dans bien des cas, les clients se retrouvent également à devoir lutter contre des thrips ayant développé une certaine résistance aux pesticides au sein de ces populations propagatrices. Si ce matériel n’est pas manipulé correctement, il peut constituer une source importante d’infestation de thrips qui peuvent rapidement s’établir et endommager les cultures.

Pupes — Les infestations de thrips se produisent souvent à partir de pupes provenant des résidus de cultures antérieures laissés sur le sol ou des milieux de culture réutilisés. Les thrips au stade nymphal rentrent en dormance pour passer l’hiver ou pour résister à d’autres conditions climatiques défavorables. Les pupes passent de longs mois au frais dans les serres ou les chambres de culture à attendre la mise en culture de nouvelles plantes et la hausse des températures avant d’émerger et de s’établir. Les producteurs sont souvent confrontés à ce problème, soit parce qu’ils ne sont pas conscients du fait que l’on peut transporter de grandes quantités de pupes en dormance entre les cultures sans les apercevoir, soit parce qu’ils sous-estiment la capacité de ces pupes à résister aux traitements d’assainissement. Comme le ravageur est en dormance et protégé dans l’enveloppe dure de sa pupe, il est extrêmement résistant aux traitements antiparasitaires.

Évents — L’autre façon dont les thrips pénètrent dans une culture, et sans doute la plus courante, est en volant dans la serre depuis les zones environnantes ou les cultures voisines. Bien que les thrips ne possèdent pas une grande capacité de vol, ils sont facilement emportés par les courants d’air et le vent qui les amènent dans les bouches d’aération ou les évents orientés face au vent. La plupart des installations connaissent une pénétration constante de thrips à faible niveau par les évents, avec souvent des pics extrêmes lorsque l’on récolte les cultures en extérieur ou lorsque celles-ci se dessèchent, ce qui a pour effet la dispersion de grandes quantités de thrips dans l’air, à la recherche d’un nouveau foyer.

Identification des thrips
L’identification formelle des thrips est une première étape importante pour déterminer quel programme de lutte antiparasitaire intégrée s’avérera le plus efficace pour votre culture et vos conditions de production — la taille du thrips et sa couleur sont les premiers critères d’identification.
À l’aide d’une loupe 10x, on peut déjà observer les adultes et déterminer s’ils sont de couleur claire ou de couleur foncée. La couleur des larves, leur mouvement, leur comportement, les dégâts qu’elles causent et la façon dont la population est répartie sur la plante sont autant d’indices importants qui permettent au producteur de savoir à quelle espèce il est confronté.
Certains thrips sont difficiles à identifier correctement. Dans ces cas, on peut envoyer des échantillons à un laboratoire pour des tests morphologiques ou génétiques et en obtenir les résultats dans un délai d’environ 1 à 3 semaines. Cependant, on a également recours à d’excellentes ressources pour tenter une identification sur place.
Dommages physiques
Tous les thrips ayant une incidence importante sur l’agriculture causent des dégâts très similaires, quelle que soit la culture qu’ils parasitent. Les dommages caractéristiques causés par leur alimentation résultent de la pénétration de leurs pièces buccales, qu’ils utilisent pour percer les tissus de la plante et aspirer le contenu cellulaire. Sans chlorophylle, la cellule et celles qui l’entourent meurent. On observe alors un aspect piqueté caractéristique qui se développe en petites stries ou lésions argentées, souvent parsemées de points d’excréments. On peut observer ces dégâts sur les pétales et les feuilles.

Les thrips peuvent également provoquer une déformation des nouveaux tissus. Les adultes se déplacent souvent vers les nouveaux points de croissance végétative et florale et y déposent leurs œufs. Les dommages causés ainsi et par l’alimentation provoquent une déformation des tissus qui devient de plus en plus apparente au fur et à mesure qu’ils se développent et qui n’est souvent remarquée que plusieurs jours ou semaines après coup. La diminution de la photosynthèse qui en résulte est liée à une baisse significative du rendement des cultures. En cas d’infestation sévère, les plantes risquent de perdre leurs feuilles, leurs fleurs et leurs fruits.

Selon l’espèce de thrips, les dégâts peuvent avoir un aspect distinct ou être concentrés sur une partie particulière de la plante. Par exemple, le thrips des petits fruits (Frankliniella occidentalis) endommage davantage les fleurs et les nouvelles pousses. En revanche, les thrips de l’impatiens (Echinothrips americanus) se concentrent souvent sur les tissus végétatifs plus âgés, situés plus bas sur la plante.
Les thrips peuvent également occasionner d’autres dégâts indirects en tant que vecteurs viraux ou, dans certains cas, comme vecteurs de champignons et de bactéries.

Transmission virale
Les thrips peuvent indirectement occasionner d’importants dégâts aux plantes en leur transmettant des virus. Environ 64 % des phytovirus connus sont transmis par des insectes tels que les pucerons, les aleurodes et les thrips.
Tous les insectes vecteurs de virus partagent de similaires pièces buccales : en stylet ou en aiguille. En perforant les tissus et en aspirant les fluides vitaux du phloème et du xylème, les pièces buccales des insectes sont exposées aux virus et aux viroïdes. Ceux-ci peuvent persister plusieurs secondes, plusieurs jours, plusieurs mois ou indéfiniment, selon le virus.
Jusqu’à présent, on a recensé 16 espèces de thrips qui sont responsables de la transmission de plus de 29 tospovirus à travers le monde. Il existe en Amérique du Nord neuf tospovirus, tous transmis principalement par Frankliniella spp :
- le virus de la tache bronzée de la tomate (TSWV)
- le virus de la chlorose de la tomate (TCSV)
- le virus des taches en anneaux de l’arachide (GRSV)
- le virus de la tache nécrotique du poivron (PNSV)
- le virus de la tache nécrotique de l’alstroémère (AINSV)
- le zucchini lethal chlorosis virus (ZLCV)
- le virus de la tache nécrotique de l’impatiens (INSV)
- le virus de la nécrose de la tige du chrysanthème (CSNV)
- le virus de la mosaïque du melon (MSMV).
Reproduction
Les thrips sont capables de se reproduire à la fois de façon sexuée ou asexuée. Les femelles fécondées déposent des œufs mâles et femelles, tandis que les femelles non fécondées ne déposent que des œufs mâles (cela peut varier d’une espèce à l’autre et dans une même espèce selon la région). Ainsi, les thrips disposent d’une variété de stratégies pour s’adapter et se répandre rapidement sans dépendre de la reproduction sexuée. Il suffit donc d’un seul individu pour générer une infestation importante.
Cycle biologique
Le thrips passe par six stades de développement : le stade d’œuf, deux stades larvaires, un stade prénymphal, un stade nymphal et le stade adulte.
L’œuf réniforme est déposé dans les tissus tendres de la plante : les jeunes feuilles, les pétales et les nervures ou les tiges tendres. Sur la plupart des plantes, on ne peut pas voir à l’œil nu les cicatrices laissées par la déposition de l’œuf, mais sur certaines plantes comme le poivron, on peut les apercevoir comme de minuscules points de piqûre. Dès l’éclosion, la petite larve fusiforme commence à se nourrir. Chaque espèce possède ses préférences quant à sa dispersion sur la plante.
Quand les ébauches alaires commencent à se développer, la larve passe au stade prénymphal immobile. Lorsque les ébauches alaires s’allongent, les antennes se recourbent sur la tête et les thrips entrent dans le stade nymphal. La plupart des espèces de thrips d’importance économique aux stades prénymphal et nymphal tombent au sol ou à terre pour se développer. La principale exception à cette règle est l’Echinothrips americanus, dont les nymphes restent sur la plante. Une fois tombées, les pupes reposent sur le sol ou s’enfoncent jusqu’à une profondeur de 15 mm. Les thrips ne se nourrissent pas à ce stade et ne réagissent que lorsqu’ils sont dérangés.
Une fois émergés, les jeunes adultes retournent sur la plante pour se nourrir, trouver un partenaire et déposer leurs œufs.

Température et développement
Les conditions environnementales jouent un rôle important dans le développement et la prolifération des thrips. La période de développement peut varier en fonction de la température, de l’humidité et de la culture. Il faut en moyenne neuf jours au thrips des petits fruits (Frankliniella occidentalis) pour passer de l’œuf à l’adulte à 30 °C, alors qu’il lui faut près de 40 jours à 15 °C. Si la température dépasse 35 °C ou est inférieure à 10 °C, le développement cesse. Généralement, tous les thrips d’importance économique se développent au même rythme. Certaines espèces exotiques ont simplement plus de mal à se développer à moins de 15 °C et elles meurent en cas d’exposition prolongée à des températures plus basses.
La présence de pollen peut également jouer un rôle important dans le développement. Les thrips se développent beaucoup plus rapidement sur les plantes qui produisent du pollen que sur les plantes qui ne produisent pas de pollen ni de fleurs.
Hivernage
Certaines espèces de thrips peuvent passer l’hiver à l’extérieur à l’état adulte. Elles migrent vers de nouvelles plantes hôtes, comme les mauvaises herbes et s’y abritent pour l’hiver. On a observé ce phénomène tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des espaces de culture chauffés. On a constaté que quelques espèces passent l’hiver sous forme d’œufs ou de larves. Ce comportement se manifeste lorsque les jours se raccourcissent, mais ce sont les températures qui jouent un rôle déterminant dans l’activité continue des thrips, leur survie pendant l’hiver ou leur mort.
Espèces de thrips nuisibles présentes au Canada
Thrips des petits fruits (Frankliniella occidentalis)
Nom d’espèce : Frankliniella occidentalis
Nom courant : thrips des petits fruits
Cultures hôtes : plus de 250 espèces de plantes (2009)
Région d’origine : l’Ouest de l’Amérique du Nord
Distribution : globale
Vue d’ensemble : Le thrips des petits fruits est originaire de la côte ouest de l’Amérique du Nord et s’est répandu dans le monde entier au cours des 30 dernières années. Il s’agit d’un ravageur important dans les serres du monde entier et c’est le thrips le plus couramment rencontré dans les serres du Canada. On les trouve souvent sur les fleurs, mais aussi sur la surface inférieure des feuilles. Outre le pollen et les tissus végétaux, on a constaté que le thrips des petits fruits se nourrit des œufs des tétranyques à deux points et du premier stade larvaire de l’aleurode des serres. Ce thrips est également connu pour sa capacité à développer rapidement une résistance aux pesticides.
Cette espèce est de taille moyenne (1,0 - 1,2 mm de long) et sa couleur peut varier du jaune au brun selon l’environnement et la saison. Ils possèdent des ocelles rouges et de longues ailes par rapport aux autres espèces de thrips.Les larves sont petites, fusiformes et jaunes. Dès qu’elles atteignent une certaine taille, elles tombent sur le sol pour se transformer en pupes. Ils sont capables d’hiverner en régions tempérées.

Thrips de l’oignon (Thrips tabaci)
Nom d’espèce : Thrips tabaci Lindeman (1889)
Nom courant : thrips de l’oignon
Cultures hôtes : plus de 391 espèces de plantes (2022)
Région d’origine : Méditerranée
Distribution : globale
Vue d’ensemble : Le thrips de l’oignon était l’espèce la plus courante et la plus dévastatrice jusque dans les années 1970-80 et il reste un ravageur important aujourd’hui. Ces insectes sont énormément répandus dans les serres du monde entier et sont également connus pour leur grande nuisance dans les champs maraîchers et de plantes ornementales. Comparé au thrips des petits fruits, il est plus sensible aux insecticides et prend souvent une place prépondérante dans les cultures où l’on fait moins appel aux produits chimiques. Cependant, ces insectes démontrent toujours une capacité redoutable à développer une résistance aux pesticides.
Le thrips de l’oignon est de taille comparable à celle du thrips des petits fruits, les adultes atteignant une longueur de 0,8 à 1,2 mm. Par rapport aux autres espèces de thrips, ils possèdent de longues ailes et ils ont un fort taux de dispersion. Ils peuvent être facilement transportés par le vent des champs aux serres et inversement. On les trouve sur la surface inférieure des feuilles dans le haut du couvert végétal, mais rarement dans les fleurs. Leur couleur varie du beige ou jaune au brun foncé, ce qui complique l’identification en fonction de celle-ci. Leurs ocelles sont gris et ressemblent souvent à une petite tache bleue entre leurs deux yeux composés. À l’état larvaire, elles sont jaune vif et elles tombent sur le sol pour se transformer en pupes. Cette espèce est capable de passer l’hiver dans les régions tempérées.

Echinothrips (Echinothrips americanus)
Nom d’espèce : Echinothrips americanus
Nom courant : thrips de l’impatiens
Région d’origine : l’Est des États-Unis
Distribution : globale
Cultures hôtes : plantes appartenant à plus de 48 familles (2014)
Vue d’ensemble : Echinothrips, également connu comme le thrips de l’impatiens, est une espèce de thrips assez grande (1,3 - 1,6 mm). Ils sont bruns ou presque noirs avec des bandes rouges caractéristiques entre les segments abdominaux. Les larves et les pupes sont translucides et, contrairement à d’autres espèces qui se laissent tomber au sol, les echinothrips à ces stades de développement restent sur la feuille.
Elles sont relativement sédentaires et se déplacent lentement, et elles peuvent rester sur la même feuille pendant des jours si on ne les dérange pas. Leur mode de vie tranquille et sédentaire offre peu d’occasions aux adultes de se retrouver pris sur des pièges collants. Ils sont donc difficiles à dépister et passent souvent inaperçus avant que les infestations atteignent une ampleur importante.
Au fur et à mesure que la population se développe, l’infestation s’étend à d’autres parties du couvert. Bien qu’ils préfèrent le feuillage, une population suffisamment importante finit par endommager les fruits et les fleurs si l’on n’y prend pas garde. Ces insectes peuvent persister toute l’année dans une serre chauffée sur les cultures et les mauvaises herbes, mais ils ne peuvent se développer qu’entre à 20 °C et 30 °C.
Les dommages qu’ils causent sont eux aussi distincts. L’aspect piqueté des feuilles peut ressembler davantage aux dégâts infligés par les tétranyques. Comme ces thrips sont plus grands et difficiles à traiter par pulvérisation dans un couvert dense, on a des préoccupations importantes quant à la résistance aux pesticides et l’identification des traitements antiparasitaires les plus efficaces.

Thrips des serres (Heliothrips haemorrhoidalis)
Nom d’espèce : Heliothrips haemorrhoidalis
Nom courant : thrips des serres
Cultures hôtes : les agrumes, les avocats et les plantes ornementales, en particulier les crotons
Région d’origine : les régions tropicales et subtropicales du monde entier
Distribution : globale
Vue d’ensemble : Cette espèce de thrips est originaire d’Amérique du Sud et, au fil du temps, s’est répandue dans le monde entier grâce au transport de plantes ornementales cultivées dans les serres à climat chaud. On ne pense pas qu’il puisse passer l’hiver dans les climats plus froids.
Pour identifier ce thrips, il faut surtout rechercher les adultes noirs ou bruns foncés à pattes jaune pâle. Les adultes ont une faible capacité de vol et ont tendance à se tenir dans les zones ombragées sur la plante. Le premier stade larvaire est blanc avec des yeux rouges. Lorsqu’elle s’est nourrie, la larve prend une couleur jaunâtre. Une larve mature mesure environ 1 mm de long. Lorsque les larves se transforment en pupes, les antennes se replient sur la tête. Les thrips aux stades prénymphal et nymphal ne se nourrissent pas.
Cette espèce de thrips endommage les plantes différemment des autres. Il provoque des lésions sur la peau dure des agrumes. Elles se présentent comme des taches en anneau ou de la rugosité irrégulière. Sur les plantes ornementales, l’insecte se nourrit principalement du feuillage, en s’attaquant d’abord à la surface inférieure. Lorsque la population augmente et se nourrit, elle migre vers la surface supérieure des plantes. Les feuilles endommagées se déforment entre les nervures latérales, commencent à se décolorer et finissent par jaunir et tomber. Au fur et à mesure que les thrips se nourrissent, ils laissent sur les plantes des gouttelettes globuleuses caractéristiques, constituées de matières fécales. La gouttelette que libère cette espèce est plus grosse que celles produites par la plupart des thrips.
Photo prise à partir de Thrips des serres — Heliothrips haemorrhoidalis (Bouché, ufl.edu ; en anglais)

Thrips du poivron (Thrips parvispinus)
Nom d’espèce : Thrips parvispinus
Nom courant : thrips du poivron
Cultures hôtes : piment, poivron, gardénia, haricot vert, pomme de terre, fraisier, agrumes, ficus, gerbera, maïs, cotonnier, oignon et souci, chrysanthème, anthurium, hoya, hibiscus, ixora, mandavilla, schefflera, etc.
Région d’origine : Asie du Sud-Est
Distribution : Australie, Inde, Europe, Afrique, Chine, États-Unis, Amérique centrale et Canada
Vue d’ensemble : Le thrips du poivron est une espèce envahissante issue de l’Asie du Sud. Au cours des dernières années, ce ravageur s’est imposé en Amérique du Nord, notamment à Hawaï au début des années 2000, en Floride en 2020 et au Canada en 2021. On redoute leur résistance aux pesticides et leur capacité à se développer rapidement dans une culture. Le traitement des infestations de cette espèce tropicale de thrips pose également problème, car de nombreux producteurs nord-américains manquent d’expérience à cet égard.
Ils s’attaquent surtout aux fleurs et aux points de croissance de la plante, laissant des dégâts qui ressemblent à ceux des tarsonèmes. Les lésions causées par leur alimentation et la déposition de leurs œufs peuvent également entraîner d’importantes cicatrices sur les fruits, le feuillage et les fleurs. Jusqu’à présent, on pense qu’ils ne peuvent pas passer l’hiver dans le climat canadien, mais qu’ils sont introduits dans les serres sur les boutures et d’autres matières végétales importées.
Cette espèce est dimorphique, c’est-à-dire que les femelles et les mâles ont un aspect différent. Les mâles adultes sont plus petits, ~0,8 mm de long, et d’un jaune plus clair que les femelles. Les femelles sont plus grandes, environ 1,1 mm de long, élancées et bicolores : la tête et le thorax sont brun clair et l’abdomen brun foncé. Ils ont des ocelles rouges et, dans certains cas, sont connus pour être particulièrement agiles et mobiles. La croissance de la population est forte et rapide, ce qui rend difficile la lutte antiparasitaire contre cette espèce, surtout si l’on ne la détecte pas à temps.

Thrips du rosier (Thrips fuscipennis)
Nom d’espèce : Thrips fuscipennis
Nom courant : thrips du rosier
Cultures hôtes : plus de 200 espèces de plantes, dont la famille des Rosacées, principalement les roses, les légumineuses et les concombres
Région d’origine : Europe
Distribution : partout dans le monde, mais peu fréquente en Amérique du Nord
Vue d’ensemble : Cette espèce de thrips a un aspect très similaire à celui du thrips de l’oignon et ne peut être distinguée de ce dernier qu’à l’aide d’un microscope. Si vous pensez être confronté à ce type de thrips, il est recommandé de les faire identifier par un spécialiste.
On les rencontre surtout dans des conditions chaudes et sèches. Les fleurs deviennent parsemées de taches et de stries claires ; les feuilles développent la moucheture argentée caractéristique.
En Europe, l’insecte passe l’hiver sur les troncs d’arbres, dans les fissures de l’écorce, ou parmi les jeunes feuilles et les pétales de fleurs dans les serres en verre. Les femelles hivernantes ne sont pas dormantes et peuvent se déplacer ou voler si les conditions se détériorent. Les pupes tombent sur le sol et se transforment là où elles se posent, y compris en terre.
On l’a détecté dans des cultures de fraises en serre en Colombie-Britannique, où il abîme les fruits, les fleurs et les feuilles.
Photo d’identification : Thrips fuscipennis — Thrips-ID (en anglais)

Thrips des fleurs (Frankliniella intonsa)
Nom d’espèce : Frankliniella intonsa
Nom courant : thrips des fleurs
Cultures hôtes : fraisiers et autres fleurs sauvages
Région d’origine : Eurasie
Distribution : dans le monde entier
Vue d’ensemble : Les adultes mesurent 2 mm de long et sont bruns avec des segments abdominaux jaunes. L’identification sur le terrain est difficile. Afin d’identifier correctement cette espèce de thrips, il convient de la faire identifier par un spécialiste.
Ce thrips est courant dans les cultures de fraises sous serre en Colombie-Britannique où il endommage les fruits, feuilles et fleurs. Ils déposent leurs œufs sur ou dans le fruit et on peut les trouver dans les organes floraux. Les pièges blancs ou bleus sont les plus efficaces pour cette espèce de thrips.
Ils passent l’hiver au Canada et les femelles émergent tôt dans la saison, principalement dans les zones non cultivées. Elles s’établissent rapidement dans les cultures de fraises et leur présence peut se prolonger jusqu’à la fin de la saison (Canovas, Guay, Fournier et Cloutier, 2023). Il a développé une résistance à certains pesticides, ce qui le rend plus difficile à éliminer. Il est connu comme vecteur de tospovirus, bien que sa capacité à les transmettre soit inférieure à celle du thrips des petits fruits.
Photo d’identification : Frankliniella intonsa — Thrips-ID (en anglais)

Thrips du piment (Scirtothrips dorsalis)
Nom d’espèce : Scirtothrips dorsalis
Nom courant : thrips du piment
Cultures hôtes : plus de 100 variétés de plantes, y compris les plantes ornementales, les piments, d’autres cultures maraîchères, etc.
Région d’origine : soit l’Asie du Sud-Est, soit le sous-continent indien
Distribution : dans le monde entier
Vue d’ensemble : Les adultes mesurent 1,2 mm, ce qui est très petit par rapport à d’autres espèces de thrips comme le thrips des petits fruits et les rend plus difficiles à repérer. Tous les stades de développement se déroulent directement sur la plante. Ce thrips est de couleur pâle avec des ailes sombres et des taches sombres formant des bandes dorsales incomplètes sur l’abdomen.
L’alimentation de cette espèce endommage les plantes en provoquant des cicatrices, en déformant les feuilles (la feuille s’enroule vers le haut et sa taille diminue) et en entraînant la décoloration des bourgeons, des fleurs et des jeunes fruits de la plante. Il se nourrit du méristème des bourgeons terminaux et d’autres parties tendres de la plante situées en surface. Les dégâts ressemblent parfois à ceux causés par les tarsonèmes. En cas d’infestation sévère, on constate une défoliation complète des plantes touchées et on risque de perdre la totalité de la culture.
En outre, cet insecte est connu pour son comportement favorable à la transmission de sept virus : la cloque du piment (CLC), le virus de la nécrose apicale de l’arachide (PBNV ; Mound and Palmer 1981, Ananthakrishnan 1993), le virus de la striure du tabac (TSV), le virus du rabougrissement jaune du melon (MYSV), le watermelon silver mottle virus (WSMoV) et la chlorose du capsicum (CaCV ; Chiemsombat et coll. 2008).
Photo d’identification : thrips du piment adulte avec ailes frangées. Photo par : Lyle J. Buss, University of Florida

Conclusion
Ce n’est qu’un petit aperçu de ce que l’on peut écrire sur les thrips des serres et des chambres de culture. Au cours des dernières années, nous avons publié d’autres articles sur la lutte biologique contre ce ravageur. Pour en savoir plus, consultez les articles suivants :
- Éliminez les thrips naturellement grâce aux acariens prédateurs! | Koppert Canada
- Problèmes de thrips? Comblez les lacunes de votre programme de lutte contre les thrips. | Koppert Canada
- Comprendre Orius | Koppert Canada
Toutefois, ceci n’est que la première partie. Bientôt nous vous apporterons encore plus d’informations sur les thrips. À suivre!